dimanche 7 mai 2017

Quand le PM Lafontant s'est fait déculotter par l'ex-ministre Bastien

Yves Romain Bastien
Le Premier ministre Jack Guy Lafontant s'est fait déculotter, ce vendredi 5 mai 2017, par Yves Romain Bastien, l'ex-ministre de l'Economie et des finances sous l'administration Privert /Jean-Charles. En effet, ce médecin de profession, au cours d'une conférence de presse tenue hier jeudi, a tenté de s'improviser comédien, politicien et expert en économie et Finances. Le PM, pour justifier son incompétence et son incapacité à matérialiser les promesses de campagne de Jomo et d’affronter les vrais défis qu'attend le peuple haïtien de son gouvernement, a cru nécessaire de rendre la transition responsable de l’échec du régime têt-kalé dont il n’est autre que l’héritier. A travers cette conférence de presse, il s’est lancé à faire des déclarations fracassantes sur l'économie et les finances, lesquelles ne peuvent être qualifiées que de pitoyables et sont, de toute évidence, indignes d’un chef de Gouvernement.

Non, Monsieur Lafontant, le Gouvernement de transition ne peut être tenu pour responsable du désastre politique, économique et financier provoqué par les décisions irrationnelles et improductives de l’équipe Martelly. Vous avez choisi d’en assurer la continuité, il vous faut faire preuve d’intelligence et vous armer de courage pour redresser la situation.

Les accusations sans fondement et la fuite de ses responsabilités sont l’apanage des faibles et des incapables. Vous êtes à la croisée des chemins, le peuple attend de vous la concrétisation des promesses électorales de Jovenel Moise. Il avait promis de mélanger l’eau, la terre, le soleil et les hommes pour développer le pays. Montrez-vous à la hauteur de la tâche et prouvez que vous êtes capable d’assurer ce mixage pour le bonheur du peuple haïtien.

Notre pays, pauvre et exsangue, qui a bénéficié de l’annulation de toutes ses dettes à la suite du tremblement de terre de janvier 2010, s’est retrouvé, après seulement cinq ans, encore une fois, lourdement endetté. Sa dette, envers le Vénézuela, dans le cadre du programme Petrocaribe, s’élève déjà à plus de deux milliards de dollars américains. Ces fonds ont surtout été utilisés dans des projets écrans, sans rentabilité aucune, juste pour satisfaire les excès mégalomanes de Monsieur Martelly. La majeure partie des contrats passés entre l’Etat et les compagnies privées ont été en dehors de la loi. Ceci ne s’applique pas uniquement au programme petrocaribe mais également aux autres programmes dans lesquels les fonds publics ont été engagés.

Les chantiers de plusieurs projets dont les fonds ont été décaissés à plus de 75% sont, soit au stade de démarrage, soit arrêtés pour fonds non disponibles. Les dettes de l’Etat vis-à-vis des firmes contractantes s’élevaient au mois de février 2016 à près de cent cinquante millions (150, 000,000) de dollars américains.

Qui n’était pas au courant que la corruption et le détournement des fonds publics étaient la marque de fabrique de l’administration Martelly ? L’ancien Ministre de l’Education nationale, Charles Tardieu, n’a pas eu tout à fait tort de déclarer " Lorsque le gouvernement incite ses citoyens à la fraude massive au travers d'un programme comme le PSUGO, il participe au développement et à l’implémentation systématique de cette culture de corruption qui s’installe depuis assez longtemps dans le curriculum caché de l’Ecole". Charles Tardieu faisait référence à cette supercherie qu’a été le FNE. Une escroquerie qui n’a jamais eu une base légale et a utilisé les fonds collectés sans les faire passer au Trésor public et par le budget. Les principaux bénéficiaires ne furent-ils pas les Députés membres du PSP, devenus membres fondateurs du PHTK.

La dépréciation de la monnaie nationale est le phénomène le plus marquant des années de Martelly et l’une de ses causes fondamentales est le déficit budgétaire des exercices 2014-2014 et 2014-2015 financés monétairement par la BRH. En effet, le taux de change de la gourde par rapport au dollar est passé de 41 gourdes en 2011 à 64 gourdes en février 2016 pour un dollar américain. Cette dépréciation s’est accélérée malgré les efforts des autorités monétaires pour en atténuer le rythme en vendant sur le marché des changes des devises puisées des réserves. Ces dernières sont donc passés de 1.3 milliards en septembre 2012 à 800 millions en décembre 2015.

Yves Romain Bastien, ancien ministre de l'économie et des finances de l'administration Privert/Jean-Charles, connu pour son franc-parler, son éloquence et sa connaissance avérée en la matière lui a donné, sur les ondes de Magic 9, une réplique en règle. Avec chiffres à l'appui , le ministre Bastien, sans faire dans la dentelle, s'est mis à corriger les cahiers de cet apprenti politicien, qui n'a fait que raviver dans la mémoire du peuple haïtien la situation précaire et désastreuse des finances publiques à l'arrivée de la transition. Il était de notoriété publique que cette situation est la conséquence logique des dérives qui ont caractérisé la gestion financière de l’Etat par les différents gouvernements de l'ère Martelly. Que Monsieur Lafontant se rappelle que le non respect des principes et des normes du budget et des procédures de passation de marché public, la dilapidation et le gaspillage des fonds publics étaient la principale caractéristique de l’équipe Têt Kalé.

Ces dérives ont été publiquement dénoncées par l'administration Privert /Jean-Charles et confirmées par le rapport de la commission Éthique et Anti-corruption du SENAT de la République. D’ailleurs plusieurs grands manitous du régime tet kalé ont été indexés et la mise en mouvement de l’action publique contre certains d’entre eux a été sollicitée par le Président de cette Commission dans ses recommandations.

Le PM a parfaitement raison. Tous les Ministères et organismes publics sont effectivement endettés et en difficulté. Comment ne pas lui rappeler, pour rafraîchir sa mémoire, que le BMPAD, chargé de la gestion des Fonds Petrocaribe et qui lui sert de cheval de bataille, était au mois de février 2016 en cessation de paiement. Les chiffres sont là, MM Lafontant et Laleau. !!!!

La banqueroute du BMPAD était connue de tous et elle alimentait les grandes manchettes de la presse nationale en février 2016. le PM Lafontant doit seulement s’informer des raisons qui ont porté Mr Laleau, qui fait actuellement office de chef de cabinet du Président de la République, à prendre la fuite (traverser la frontière en catimini) alors qu'il était invité par le Commissaire du gouvernement d'alors pour une confrontation avec l’ancien Directeur Général de cette entité l’ayant accusé de complicité et de responsabilité dans la faillite du BMPAD.

Puisque Monsieur Lafontant se porte garant de la bonne gestion par l’équipe Têt Kalé des Fonds Petrocaribe, qu’il dise à la nation :

• A combien s'élevait la dette à court terme vis-à-vis de PDVSA au mois de mars 2016 des factures d’achat de carburant restées impayées de juillet 2015 à février 2016, juste l’arrivée de l’équipe de Transition ?
. A combien s'élevait la dette vis-à-vis des fournisseurs de l'Etat et les entrepreneurs de travaux financés à travers les fonds Petrocaribe en février 2016?
• A combien s’élevait le montant cumulé des dettes à long terme restées impayées au mois de février 2016
• Le bénéfice pour le peuple haïtien des deux milliards de dollars américains gaspillés dans des projets bidon par le régime de Martelly et Lamothe avec la complicité de Wilson Laleau, grand Ministre des Finances.

Les dettes au niveau du secteur de l’éducation

Le PM Lafontant est étranger aux affaires du pays. Il n’y vivait pas et n’était pas au courant de ce qui se passait dans l’administration publique. D’ailleurs, il ne savait même pas, en tant que professionnel voire même en tant que citoyen, qu’il devait payer des impôts. Il ne maitrisait pas la réalité qui prévalait dans ce secteur de l’arrivée de l’équipe de transition en février 2016 à aujourd’hui encore.

Le PSUGO, programme phare de MJM, recensait, au mois de février 2016, près de 3000 opérateurs qui revendiquaient leur allocation pour plus de deux ans alors que les fonds collectés pour ce programme à partir de la taxe sur les appels par le CONATEL et les redevances sur les transferts par la BRH étaient totalement utilisés ?

Les organisations syndicales d’enseignants, niveau des différentes écoles nationales du pays réclamaient au nom de leurs milliers de membres, des années d’arriérés de salaires. L’inventaire révèle que plus de trois mille enseignants se trouvant dans des salles de classe depuis des années étaient sans lettre de nomination et sans émoluments et plus de trois mille autres avec leur lettre de nomination étaient sans solde.

Ministères et organismes publics

La situation au niveau des autres Ministères et organismes publics. « Twou manti pa fon PM Lafontant ».

FAES. Les principaux bailleurs de fonds avaient suspendu tout financement au FAES qui, à leurs yeux, avait perdu toute crédibilité. Certaines institutions osaient même lui réclamer le remboursement des fonds mal gérés par les différents directeurs qui se sont succédé sous l'administration Martelly.

MTPTC. Le PM doit demander à l’actuel Ministre, quelle était sa part responsabilité, comme Directeur Général, dans le scandale de détournement de près de deux cent millions (200, 000,000) de gourdes au préjudice du Ministère, impliquant des cadres de l’Institution avec la complicité du chauffeur de l’ancien Ministre actuellement Sénateur de la République. Le PM Lafontant n’était pas au courant de l’avilissement subi par l’Etat haïtien, sommé de rembourser à la BID les fonds alloués par cette institution régionale pour un projet dans le Nord-est. Le MTPTC, en dehors des procédures et des normes en vigueur et des clauses du contrat liant ce Ministère à la BID, de façon irrégulière, a attribué ce projet à AGRITRANS de JOMO lequel ne l’a pas exécuté à la satisfaction du bailleur !

Le programme de restaurant communautaire assuré par le Ministère des Affaires Sociales était une véritable opération de siphonage des fonds petrocaribe. La Commission présidentielle en charge de ce projet, baptisé hypocritement « lutte contre la pauvreté extrême", était présidée par Sophia Martelly. Au mois de février 2016, les maisons louées de particuliers et les employés recrutés dans le cadre de ce programme, pendant plusieurs mois, n'avaient pas reçu leur dû. Cette situation et d’autres dettes laissées par l’équipe Têt Kalé, est restée une épine au talon du Ministre jusqu'à son départ du gouvernement en mars 2017.

Le MAE. Là encore, Monsieur Lafontant a sciemment menti à la nation. Il est de notoriété publique que ce Ministère est la chasse gardée des parlementaires proches de MJM. Il a été la rampe de lancement utilisée par Laurent Lamothe pour consolider et fidéliser sa majorité à la Chambre des Députés et ses supporteurs au Sénat de la République. La transition a reçu en héritage ce personnel pléthorique qu’il ne pouvait renvoyer sans provoquer la fronde au niveau de la chambre des Députés dont Jovenel Moise, à travers APH, tirait les ficelles.

A un autre niveau, on peut se permettre de croire que la situation financière laissée par l’équipe de transition n’était pas trop mauvaise. L’administration du Président Jovenel Moise, sans modification du budget de l’exercice 2016-2017 adopté par l’équipe de transition, a pu mobiliser des fonds importants pour réaliser son carnaval dans la ville des Cayes et financer sa caravane de changement. Autrement dit, le PM doit rectifier le tire en expliquant à la nation la provenance desdits fonds. A savoir, dans quelle rubrique budgétaire étaient inscrits :

- Le carnaval des Cayes financé à la hauteur de 240 millions de gourdes. - - La caravane du changement financée à hauteur de 197 millions de gourdes.
- Les dépenses d’intelligence et de sécurité pour ces deux déplacements du mois de mai d’un montant de Cent Millions de gourdes.

En résumé, les déclarations du PM Lafontant ne font qu'éclabousser davantage les principaux membres et collaborateurs du régime Têt kalé, dont il a aujourd'hui la charge d'assurer la continuité. La transition n’est pas responsable de la débâcle de Michel Martelly et de Laurent lamothe à la tête du pays et ne peut, non plus, servir de bouc-émissaire pour justifier les maladresses et l’inexpérience de ces deux compères empêtrés dans la gestion d’une entité dont ils ne connaissent pas les rouages et pour laquelle, il n‘ont pas les compétences et qualifications requises.

Jean-Frantz DESAUGUSTE
Port-au-Prince, le 5 mai 2017

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